Langues & FrancophonieSix mois au Québec

Des mots québécois à adopter

Vous vous en doutez, me connaissant un peu, j’ai débarqué au Québec avide d’apprendre des expressions croustillantes! De ce côté-là, j’ai été servie. La Belle-Province dispose d’un vocabulaire propre extrêmement riche, qui a même fait pâlir d’envie ma collection de mots suisses. Dans quelques semaines je serai déjà de retour en Europe, or je ne rentrerai pas seule… J’ai bien l’intention d’emporter quelques expressions dans ma valise. Voici donc les mots québécois que j’ai décidé d’adopter!

Je commence avec mes trois préférés, aussi mignons qu’expressifs.

Croustilles et grignotines

Les chips croustillent sous la dent et on grignote des en-cas entre les repas, en Europe aussi! Par contre il nous manque deux mots pour le dire avec grâce. Dorénavant, je mangerai donc des croustilles et des grignotines. Les premières sont des chips, et les secondes, des snack, des en-cas.

Du coup, les croustilles sont des grignotines (vous suivez?).

 

Exercice pratique: au prochain apéro chez vos amis, plutôt que de dire « J’ai apporté des biscuits d’apéro », essayez, « J’ai apporté des grignotines. » Une expression du plus bel effet!

La débarbouillette

Encore une fois, c’est facile à deviner, non? La débarbouillette sert à se … débarbouiller! C’est une lavette, quoi. Rhooo, les Français ne comprennent pas? Alors disons une sorte de gant de toilette déplié. Ça marche aussi pour appeler les lingettes, sauf erreur.

Par contre attention, la lavette suisse a beau être une débarbouillette, la lavette au Québec est plutôt une patte pour faire la vaisselle. Ou une espèce de chiffon pour les Français qui n’ont pas révisé leurs mots suisses.

Les rôties

« Au petit-déjeuner, je mange des rôties. »

En voyant rôties écrit sur le menu du brunch, mon Français du Sud a d’abord espéré se faire servir une pièce de viande. Tout faux, ‘les rôties’ sont le joli nom des toasts au Québec! Et je ne parle pas de ces trucs secs qu’on mange quand on est malade, mais du pain de mie passé au toasteur.

Donner le goût

« Cela me donne le goût d’essayer. »

Cette expression, ‘donner le goût’, est un synonyme de « donner envie ». Je compte l’emporter avec moi.

« Qu’on me donne le goût. Le goût d’avoir le goût… »

T’es ben fine!

Cela ne veut pas dire que vous êtes mince ou maligne! Au Québec, fin ou fine sert aussi à souligner la nature gentille et aimable d’une personne…

« Elle est tellement fine » veut donc dire « elle est tellement gentille ».

C’est pas si pire

Après avoir goûté au « c’est pas si pire », il devient difficile de s’en défaire. Très pratique pour ponctuer toutes sortes de conversations, cette expression signifie quelque chose comme « c’est pas si mal ».

« Il fait moins trente degrés parfois à Montréal, mais c’est pas si pire. » (Oui, oui, c’est ça!)

Les maringouins

« Tous aux abris, les maringouins attaquent! » Non, mais j’essaie de vous faire peur… ce sont simplement des bibittes qui piquent, les maringouins, de bêtes moustiques! Mais le mot est beaucoup plus chouette. Et vu la quantité qu’il y en a au Québec, ils méritent bien une appellation un peu spéciale.

Le babillard

« Dans mon bureau, j’ai accroché un babillard, mais il est un peu croche »

Ce mot expressif et génial désigne… un tableau d’affichage!

Croche

Courbé. Tordu. Pas droit, quoi. « Elle me regarde croche! » veut dire, « Elle me regarde de travers. » Un genou peut être croche. Ou un babillard. Et même un élu. Dans ce cas, cela veut dire « malhonnête », « moralement douteux ».

Écoeurant

Bon, celui-là, je n’arrive pas à l’utiliser moi-même, mais j’adore l’entendre. En plus de son sens premier, cet adjectif peut signifier des choses radicalement opposées. Il sert à « marquer l’enthousiasme ou la valeur esthétique de quelque chose ». Si un Québécois ponctue un de vos exploits par « C’est écœurant ! », ne vous vexez pas! Comme dans « J’ai eu une promotion! » « C’est écœurant! » Cela ne veut pas dire qu’il est jaloux, mais qu’il trouve que « c’est vachement chouette ! »  Attention, par contre si on vous traite d’écœurant, ne le prenez pas pour un compliment. Un écœurant est en effet un salaud. Un terme subtil à étudier!  [source de la définition]

Astheure et Icitte

« Astheure, on danse icitte! »

Cela veut dire que désormais, on danse ici! Astheure est la contraction de… Oh et puis, vous avez sûrement deviné, hein.

Minoucher

« Minouche-moi!  » chante Christian Jacques… Ce verbe québécois mignonnet peut avoir deux sens: câliner, bécoter ou … flatter l’ego de quelqu’un.

Avec mon français international, je pourrais dire: « C’est un vrai gâtion, il veut tout le temps que je le minouche. »

Magasiner

L’indispensable! Il remplace avantageusement l’expression « faire les magasins ».

Je magasine, tu magasines, il magasine, nous magasinons, plus personne n’a un rond…

La peignure

Un drôle de synonyme pour… coiffure. « T’as une belle peignure aujourd’hui. »

Écrapoutir ou écrapoutiller

Des synonymes géniaux d’écraser ou écrabouiller. Si vous ne savez pas comment conjuguer écrapoutir, je vous renvoie ici.

 

Voilà, c’est fini! Si vous n’en avez pas eu assez, vous pouvez collecter d’autres mots québécois sur ce dictionnaire en ligne, ou celui-là. Peut-être voudrez-vous adopter « menterie », « maganer » ou « épeurant », qui sait!

Alors, avez-vous envie d’accueillir certains de mes mots québécois préférés dans votre vocabulaire? J’ai besoin d’un peu d’aide pour leur faire traverser l’Atlantique :) Dites-moi aussi quels sont les expressions québécoises qui vous plaisent le plus, qu’elles figurent icitte – ou pas!

Et si des Québécois passent par cette page, et veulent apporter un complément d’info sur l’usage d’un mot, une nuance voire une correction: qu’ils n’hésitent pas! Cela ne fait que six mois que j’étudie le français de la Belle-Province, après tout!

PS. Les anglicismes au QuébecLa dernière fois, je vous avais parlé de quelques québécismes qui s’opposent aux anglicismes courants en français d’Europe, comme hydrofuge pour waterproof, ou magasiner plutôt que faire du shopping (bien que mes copines disent aussi « On va faire les mags ct’aprèm »). J’évoquais dans ce billet l’influence importante de l’anglais sur le québécois, et ses emprunts tels que gun, gang, game, c’est l’fun ou party. J’espère vous avoir montré à présent que le québécois ne s’arrête pas aux emprunts à l’anglais, et comprend un tas de mot purement francophones inusités en Europe!

 

 

kantutita

Signes particuliers: toujours une tasse de thé et un livre à la main! Suissesse expatriée en Alsace, après plusieurs escales en France et une parenthèse montréalaise, je blogue depuis plus de dix ans! Et je cultive un faible pour la papeterie, le chocolat et le Japon...

24 réflexions sur “Des mots québécois à adopter

  • Rah je suis déçue mais en bien de ton article :) :) j’ai bien la débarbouillette on voit bien le principe :) par contre le « j’ai le gout » il me semble que ça se dit aussi en France :)

    A+
    Karine

    Répondre
    • Déçue en bien!! une de mes expressions suisses préférées :))

      J’ai le goût oui, mais « donner le goût », je ne crois pas que cela s’emploie?

      Répondre
  • « ce sont simplement des bibittes qui piquent » – erm :-)

    Répondre
    • Pas d’esprit mal placé hein! Les bibittes sont simplement des bêbêtes au Québec ;)

      Répondre
      • Des bébittes ce sont des moutisques ça peut être aussi toutes sortes d’insectes répugnantes.
        On dit de quelqu’un qui a l’esprit tourmenté « y va pas bien y’a des bébittes dans’ tête  »
        On dit aussi quand une personne est reconnu pour avoir une personnalité plutôt bizarre que c’est une drôle de bébitte ex. Fait pas le saut quand tu vas rencontrer Serge c’est une drôle de bébitte mais il est cool

        Répondre
    • N’est-ce pas? :) Et il y en a des centaines et des centaines!!!

      Répondre
  • J’utilise quotidiennement « écrapou » pour décrire les poses que prend ma chatte, comme « Cathy est écrapou sur le lit ». :-) Pour ce qui est des « rôties », je le vois parfois sur des menus de restaurants, mais c’est TRÈS rare que j’entende quelqu’un le dire, « toast » reste quand même plus utilisé ici aussi! ;-)

    Répondre
    • Écrapou tout court? C’est génial comme mot! Rhôôô, tu casses mon mythe des rôties. Je l’ai entendu dire par des personnes ayant passé la quarantaine cinquantaine en voyageant au Québec dans les chambres d’hôtes. Je note donc que « toast » est plus courant :)

      Répondre
      • Au Québec il n’y a pas de « chambres d’hôte ». Il y a des « maisons de chambres ». Nuance !

        Répondre
        • Chambre d’hôte et maison de chambres Ce n’est pas pareil…
          une chambre d’hôte est plutôt commerciale et sur une courte durée offert au touristes.
          Une maison de chambre c’est généralement pour du long terme pour les gens n’ayant pas Ou peu de sous oú les chambres sont fermé à clé et qu’il n’y a qu’une toilette pour un étage pour différentS locataires. Généralement dans des quartiers populaires.

          Répondre
  • Super ton article, sans vouloir te minoucher (je vais l’adopter celui-là, c’est trop mignon). Par contre fais gaffe quand tu diras que tu ramènes des croustilles, on pourrait croire qu’il s’agit d’un certain produit apéritif de Belin ;)
    J’adore écouter parler les québécois avec toutes leurs expressions. Il y en a une malgré tout qui me perturbe, mais surtout à cause du caractère féminin alors que chez nous c’est masculin « je vais à la job ».
    Bises et à bientôt sur le vieux continent !

    Répondre
    • Coucou Clumsy, merci pour ton ptit message et ton enthousiasme pour le mot « minoucher »! Ah ben oui, y’a la job, et aussi les distributrices (les distributeurs chez nous) qui changent de genre, c’est assez drôle.
      J’espère te croiser bien vite à Montpellier ;)

      Répondre
      • Distributeurs! C’est effectivement surprenant!

        Répondre
  • Un étudiant québécois

    Excellent article. Je suis moi-même Québécois et je déménagerai dans ta ville natale en janvier. S’il est vrai que notre français est teinté par l’influence anglophone de nos voisins et que nous utilisons (souvent inconsciemment) des anglicismes dans notre franc-parler, nos politiques linguistiques en matière d’affichage (affiches de commerces, emballages de produits, publicités, etc.) ont fait apparaître bon nombre de termes plutôt particuliers. En fait, ces lois ont pour objectif de protéger la langue française mise en péril par la forte présence anglophone au Québec. « Croustilles » par exemple, c’est un terme qu’on peut lire sur les étagères de tout bon  » dépanneur  » (épicerie) mais bien sincèrement, je n’ai jamais entendu un Québécois employer ce terme dans son franc-parler. On dit chips, criss!

    Merci pour ton blog, ça me prépare  » tranquillement pas vite  » à ce que je m’apprête à vivre.

    Répondre
    • Merci pour ton retour! C’est vrai, un Québécois bientôt à Neuchâtel? J’espère que tu trouves sur le blog de quoi te préparer au petit choc culturel qui t’attend. La rubrique « Bienvenue en Suisse » peut t’être utile, je tente d’y parler de spécificités de mon pays (multilinguisme, votations, etc).
      Sois le bienvenu aussi si tu veux poster tes observations sur les Suisses dans les commentaires du blog après installation ;)
      Je suis déçue que « chips » reste le mot courant, parce que croustille c’est si mignon!

      Répondre
  • Désolé mais débarbouillette c’est pas de chez nous. C’est de la « parlure québecoise ». J’aime beaucoup ce mot que j’ai entendu à Montréal. je ne l’ai jamais entendu en Suisse. Chez nous on dit juste une lavette.

    Répondre
    • Heu… Il doit y avoir un malentendu, il s’agit bien d’un billet sur les mots québécois ;) et pas sur les mots suisses! Jamais je n’ai dit que débarbouillette serait suisse (??)

      Répondre
  • On apprend des trucs, c’est très sympa.

    J’apporte cependant une rectification : le mot « rôties » était utilisé en France naguère pour désigner le pain grillé.

    Répondre
    • C’est vrai? Alors c’est vous qui m’apprenez quelque chose!
      Dommage qu’on l’ait abandonné, je le trouve sympa comme mot!

      Répondre
  • astheure est un mot wallon de Belgique, qui signifie maintenant, désormais.
    Preuve que le français voyage, copie, migre. ;)

    Répondre
  • Bonjour !
    Moi, quand je n’emploie pas le terme de courrier électronique, j’aime bien employer le mot « courriel » à la place d' »email » ou « mail » car courriel vient du français alors qu' »email » vient de la langue anglaise. N’acceptant pas l’intrusion de l’anglais, quelque soit la pratique courante des Français, je préfère adopter le québécois. Je trouve, en plus, que ce mot est très joli, très harmonieux, presque chantant. :-)

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *