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Montpellier, mon QG d’expat

Montpellier arc-de-triomphe

Laissez-moi vous brosser un portrait de Montpellier, comme je l’ai découverte à mon arrivée au Sud de la France.

Il y a trois ans, je me suis établie dans cette ville. Alors que je rêvais d’expatriation exotique, je me suis retrouvée à quelques heures de route de mon point d’origine, chez nos voisins français ! Je croyais que le décalage culturel ne se mesurerait qu’en millimètres et cela me chagrinait. Vous savez à présent combien je me trompais.

Quelqu’un, un soir au Bar King, m’avait dit « Tu vas vivre à Montpellier? C’est génial, c’est une ville vraiment cool, c’est comme Neuchâtel, mais en version française. » Je n’avais pas tellement pris cette promesse au sérieux à l’époque, mais c’est vrai… Elles ont plusieurs points communs: elles gardent une taille humaine de par leur petit centre piéton, facile à traverser à pied, ce sont des villes culturellement dynamiques (s’il y a un Lausannois ou un Genevois qui rigole, il sort!) dans un écrin historique magnifique. Bon, après, Montpellier est la huitième ville de France, et Neuchâtel compte 30’000 habitants.

Revenons dans le Sud:

Il ne m’a fallu que très peu de temps pour tomber amoureuse de Montpellier, de ces entrelacs de ruelles médiévales que les locaux appellent « L’Écusson » et qui composent son centre-ville piéton.

De mon petit appartement, il ne me faut que cinq minutes pour l’atteindre. Je passe sous un monument à l’apparence factice, l’Arc de Triomphe, et j’y suis. Je longe ensuite une rangée de somptueux immeubles haussmaniens pour rejoindre les rues passantes.

Montpellier et ses volets gris
Les volets gris, signe particulier du centre historique de Montpellier

Au début, je me perdais avec délice dans la cité aux volets gris, jour après jour, incapable d’en visualiser la géographie… À présent, elle est devenu ma ville, mais au départ, c’était réellement compliqué de naviguer dans ses rues médiévales alambiquées.

Les pèlerins jouent au Petit Poucet avec ces coquillages indiquant le chemin de Compostelle

À l’époque, j’avais besoin de ces points de repères, imposants et portant des noms bibliques : Saint Anne, Saint Pierre et Saint Roch. Trois églises qui égarent aussi ceux qui les confondent. Saint Roch, patron de la ville, attire sur son parvis une faune polyglotte et hirsute: des randonneurs aux cheveux gras, les pieds calés dans des sandales de sport. Leurs silhouettes déformées par d’immenses sacs à dos se découpent devant l’autel. Ce sont des pèlerins sur le camin roumieu, l’un des quare chemins de Compostelle. L’itinéraire est symbolisé dans la ville par une série de coquillages métalliques semés sur les trottoirs.

Un jour j’entends l’un des pèlerins faire une requête particulière à une bonne sœur : arrivé de Compostelle, après des jours de marche, il a un rêve en tête: célébrer la messe à Saint-Roch. Tout en faisant mine d’admirer un palmier sur un vitrail, je jette un coup d’œil à ce curé en short, me retenant de rire de sa dégaine.

L’église Saint-Roch, dans un quartier plein de petits restaus
Sainte-Anne, une église transformée en salle d’exposition d’art

Façades chargées d’histoire(s)

Ville aux secrets indénombrables, Montpellier s’enorgueillit de la beauté de ses hôtels particuliers, aux cours intérieures toujours closes. Fermées aussi, les portes de l’antique laboratoire d’anatomie de la faculté de médecine, qui abrite une épouvantable collection de poumons desséchés. Quelques touristes chanceux -dont moi – peuvent aussi se targuer d’avoir vu le mikvé, un bain rituel juif presque oublié au sous-sol d’un immeuble en rénovation. (Ce n’est qu’un décevant bassin alimenté par une source. De toute évidence, sa dimension historique m’échappe.)

Montpellier
Si vous trouvez la porte d’un hôtel particulier ouverte, empressez-vous d’y jeter un oeil: certains trésors de Montpellier sont ainsi cachés…

 

Heureusement, Montpellier ne cache pas l’ensemble de ses charmes : chaque enseigne, chaque café est susceptible de renfermer un bijou architectural de pierres apparentes et d’arches voûtées. Il suffit d’avoir le nez en l’air pour découvrir chaque jour de nouveaux détails.

La ville porte généreusement les pans de son histoire sur ses murs, dans le labyrinthe de ruelles tortueuses, pentues ou malodorantes. Un panneau indique que Rabelais y a fait ses études de médecine. Des noms énigmatiques soufflent un parfum de poésie aux passants, alors qu’il empruntent la Rue du Four qui passe, celle des Sœurs Noires ou la Ruelle Astruc.

Le ruisseau qui reniait son nom

Sur d’autres plaques, on devine des traces d’occitan, une langue qui ne résonne plus dans la cité que dans la bouche de quelques farouches défenseurs. Prudence donc en descendant la rue Cope Cambes, surnommée ainsi à cause de son escarpement entraînant des jambes cassées. Il y avait de quoi rire en contemplant le rachitique ruisseau du Merdançon, rebaptisé Verdanson en version française, histoire de faire plus classe. Deux panneaux accrochés l’un au-dessus de l’autre dévoilent la supercherie, qui ne semble troubler personne. Le fil d’eau croupissant m’apparaît d’autant plus ridicule qu’il renie son nom !

Je l’appelle Merdansson, pour rétablir la vérité. 

montpellier street art

À Montpellier, des mosaïques de Space Invader sont apposées sur les façades aussi naturellement que les détails architecturaux historiques. Elles partagent les murs avec des silhouettes de chats. Une femme fait du parachute avec son soutien-gorge. Un superhéros toise de haut les passants. Un personnage aux longes jambes erre partout, démultiplié. Art particulièrement éphémère car combattu avec fougue par les employés de voirie, le street art est défendu par des passionnés qui ouvrent les yeux du public en organisant des visites guidées. Des retraités incrédules découvrent ainsi le blaz des artistes redécorant les murs montpelliérains : Al Sticking, Polar ou les Cerveaux Lents.

Jongler entre trois français autour d’un verre de pastis

Montpellier place de la comedie
La Place de la Comédie, touristique mais emblématique! Pour un verre, préférez les petites terrasses égarées au gré des ruelles médiévales, où les consommations sont -normalement – moins chères! Dans le fond de la photo, la fontaine des 3 Grâces et l’opéra qui donne son nom à la place.

Une farandole de petites terrasses charmantes me font constamment de l’œil sous ce ciel toujours bleu. Je m’efforce toujours de faire un pas de côté, d’éviter le point névralgique de la ville, la touristissime place de la Comédie, et son homologue branchouille prise d’assaut par les étudiants, la place Jean Jaurès.

 

Terrasses Montpellier
La Place Saint-Côme, à mon avis plus charmante que les places de la Comédie ou Jean Jaurès!

J’ai aussi compris qu’il faut renoncer à commander du thé froid, une expression opaque pour les serveurs français accoutumés à l’ice tea. Pourtant je me trouve dans un pays qui lutte stérilement contre les anglicismes! Je note les différences entre l’Helvétie et l’Hexagone car elles m’espantent, J’ai troqué le thé froid pour du sirop d’orgeat, qui se charge d’une agréable dose de Ricard l’heure de l’apéro venue et prend ainsi le petit nom de mauresque. Je deviens trilingue : mélangeant helvétismes, sudismes et français standard dans mes phrases, sans y prendre garde.

Bref, je me sentais chez moi, à Montpellier.

Il était donc bientôt temps de repartir…

Il m’a fallu longtemps avant de réussir à terminer ce billet sur Montpellier, tant j’aurais à dire sur cette superbe ville. Peut-être que d’autres postes montpelliérains suivront, selon mon humeur…

kantutita

Signes particuliers: toujours une tasse de thé et un livre à la main! Suissesse expatriée en Alsace, après plusieurs escales en France et une parenthèse montréalaise, je blogue depuis plus de dix ans! Et je cultive un faible pour la papeterie, le chocolat et le Japon...

9 réflexions sur “Montpellier, mon QG d’expat

  • Montpellier est une ville superbe, mes deux petites soeurs y vivent et je leur rends visite avec plaisir – mais hélas trop rarement.
    Sympa cette anecdote du thé froid, c’est vrai qu’ils sont fous ces français à aimer parler anglais :-) J’adore les noms des rues à l’ancienne en tout cas.

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    • Eh oui Mathilde :) Même après trois ans sur place, je m’émerveille toujours autant en me promenant dans le centre historique. Tu as de la chance d’avoir un pied à terre ici… Mais je comprends que tu ne peux pas traverser l’Atlantique trop souvent!

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  • Superbe article, dans lequel Montpellier est racontée magnifiquement !! Merci de nous rappeler que nous vivons dans une si jolie ville :)

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  • Merci de cette éloge à Montpellier. C’est un plaisir à lire et une invitation à une promenade le nez en l’air.

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  • Bonjour,

    J’ai été étudiant à Montpellier il y a une vingtaine d’années et j’en garde un souvenir extraordinaire.
    J’y ai de la famille proche aux alentours; étant fonctionnaire, j’hésite à demander ma mutation pour là-bas, étant donné que je pourrais l’obtenir facilement… à suivre

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    • Merci pour votre mot! Eh bien, ce serait une belle opportunité de revenir au soleil. :) Vive Montpellier, comme vous le dites si bien!
      Je n’ai pas encore visité Rennes, mais elle a la réputation d’être aussi une ville très agréable à vivre. Bien sûr les Français du Sud la trouvent trop au nord…

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  • J’ai oublié de préciser que j’habite à Rennes…
    Bonne continuation à vous et vive Montpellier !!!

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