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Le plateau de fromages, une institution française

La Suisse aime se considérer comme LE pays du fromage. Or depuis que je vis en France, j’observe avec quelle gloutonnerie nos voisins dévorent leurs camemberts, chèvres frais et tomes sur leur plateau de fromages… Je dois témoigner en leur faveur: ils méritent de partager ce titre hautement fromagifique avec nous.

Ci-dessus: un morbier, reconnaissable à sa rayure verte, une tomme de Savoie et un délicieux fromage de brebis tout blanc.

Faisons quelques comptes. Si l’on préparait un plateau de fromages géant avec toutes les variétés de France, on se retrouverait face à… 1’200 frometons! Impressionnant non? Seul Gargantua en viendrait à bout. Or compte tenu de la différence de taille, la Suisse en compte un nombre encore plus impressionnant: 450 fromages, sur un territoire bien plus concentré! Près de la moitié du lait produit en Helvétie est transformée en vrai gruyère, emmenthal, tête de moine, appenzeller et autres spécialités d’après le site Switzerland Cheese.

Côté consommation, Français comme Suisses en avalent une vingtaine de kilo par tête de pipe chaque année (c’est même plus que le chocolat! Rappelez-vous, nous avions fait les comptes il y a quelques semaines). Les stats citées par Wikipédia donnent ces chiffres: 24,6 kg par Français (en 2008) et  21,41 kg par Suisse (2009). Ils nous battent! Et cela ne m’étonne pas tant que ça…

Du fromage à tous les repas

Le plateau de fromages est une institution ici! Présent à chaque repas, le fromage en constitue l’un des plats… à lui tout seul. Un repas français traditionnel se déroule donc ainsi: une petite entrée… un plat de résistance… LE plateau de fromages… et le dessert (pour peu qu’on ait encore faim). Le tout se déroule avec du pain frais à disposition, qui est mangé à toutes les étapes par les convives (sauf au dessert, évidemment). Je vous parlais d’ailleurs de cette monomanie du pain ici: « Passe-moi le paing« .

La coutume du plateau de fromage m’a beaucoup étonnée au départ. Bien sûr, c’est traditionnel, donc on le voit à tous les dîners où l’on est invités, mais je ne sais pas si les Français mangent aussi systématiquement du fromage en dessert dans la vie de tous les jours. C’est toutefois le cas de plusieurs d’entre eux autour de moi… Une fois le dîner fini, on sort un demi camembert du frigo pour clore le repas.

Pour ma part, je n’ai toujours pas réussi à m’habituer à l’irruption de ce fameux plateau de fromages. Au moment où on le sert, à chaque fois, je me dis « M***, je l’avais oublié celui-là! » Je n’ai généralement déjà plus faim… et en mange un petit bout par politesse pour me réserver pour le vrai dessert. Je me demande comment les Français arrivent encore à l’avaler, après tout ça.

Le fromage figure… sur la carte des desserts!

Ce fameux plateau est d’ailleurs toujours disponible sur la carte des restaurants –  rubrique Desserts – sauf quand une rubrique spéciale lui est consacrée. Estrange, les Français considèrent donc le fromage comme un dessert!!! Pourtant c’est salé – donc j’ai de la peine à comprendre – pour moi le concept de dessert reposerait avant tout sur le sucre.

Chers amis français, je dois vous indiquer que cet entremet fromagé est une spécificité bien de chez vous. En Suisse, on ne clôt jamais le repas par du gruyère ou une tome vaudoise. De mon expérience familiale, on le mange soit râpé ou fondu avec le plat principal, soit… avec du pain, mais il constitue alors le clou du repas, avec une salade par exemple. Dans ma famille, chaque soir, on ne soupait que cela: du pain, du fromage, de la charcuterie et de la salade. Le Parfait est en option. Certains Helvètes appellent ce dîner frugal « un café complet ». Et on ne mange pas un café complet en plus de chaque repas, contrairement à vous.

Après, bien sûr, on a inventé la raclette, le gâteau au fromage (à ne pas confondre avec du cheese cake!!) ET la fondue… Donc on rattrape notre quota de fromage autrement.

Une soirée plateau de fromages

La semaine dernière, j’ai été conviée à une soirée festival de fromages près de Montpellier. Regardez-moi cette table! Les 5 convives avaient chacun pour mission de ramener quelques morceaux crémeux.

Que du beau monde! Je vous présente les invités ci-dessous: il y avait des pélardons (des petits fromages de chèvre typiques du Languedoc-Roussillon, j’ai d’ailleurs visité une fromagerie dans le massif des Cévennes- je vous en parlerai sans doute une fois), du fromage de chèvre,  du gouda au cumin et du camembert.

Le clan des bleus: le rond, c’est la Fourme d’ Ambert, et le carré, le fameux Mr Roquefort. Ce fromage de brebis est fabriqué non loin d’ici, près du Larzac, à Roquefort-sur-Soulzon. Je rêverais d’aller visiter les grottes naturelles où ils sont affinés. Ces « fleurines » assurent une ventilation parfaite aux caves des fromagers, dans la roche. Incroyable non?

La légende du fromage corse aux asticots

Un Corse assis autour de la table (il s’agit cette fois d’un convive humain) m’a parlé d’une spécialité de son île: le fameux fromage corse à vers. Vous n’avez peut-être pas entendu cette histoire: mais les fiers Corses font vieillir un laitage célèbre grâce à des vers qui le digèrent et le décomposent. Eh bien, pour impressionner les touristes, ils découpent le morceau de frometon avec les vers encore dedans, qui font alors des bonds!

Quand eux veulent s’en payer une tranche, ils le laissent par contre passer la nuit sur un bord de fenêtre, et les vers se barrent, leur baluchon sous le bras. (Je ne sais pas par quel miracle aucun renard, corbeau, cochonglier ou autre bestiole corse ne le dévore alors.)

Ce soir-là, j’ai donc fait un tour de France des fromages… avec les yeux et le nez. Je sortais en effet d’une petite grippe et n’avait rien avalé depuis trois jours… Quelle poisse! Je prendrai ma revanche lors d’une soirée raclette ou fondue.

Comme j’adore le fromage suisse, je vous parlerai d’ici peu des différences terminologiques dont je souffre en France. J’ai acheté du gruyère, de l’emmenthal ou de la tomme, or cela ne désigne pas du tout les mêmes produits qu’en Helvétie!! À suivre donc.

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kantutita

Signes particuliers: toujours une tasse de thé et un livre à la main! Suissesse expatriée en Alsace, après plusieurs escales en France et une parenthèse montréalaise, je blogue depuis plus de dix ans! Et je cultive un faible pour la papeterie, le chocolat et le Japon...

10 réflexions sur “Le plateau de fromages, une institution française

  • Ah, bien contente que tu considères que nous pouvons partager le titre de « Pays du Fromage ». Pour ma part, j’adore les fromages français ET suisses;-)

    Personnellement, j’ai du mal à faire le fameux repas entrée-plat-fromage-dessert, cela fait en général vraiment trop! Dans ma famille, on ne le fait en général que pour des dîners « de fête », pas au quotidien.

    En revanche j’aime bien de temps en temps faire un dîner pain-fromage: c’est délicieux!!

    J’attends avec impatience ton article sur la terminologie, les Français appellent malheurusement « gruyèe » un peu n’importe quel fromage rapé: hérésie!!! :-p

    Bises,

    Laurène, expat française en Suisse, du blog Carnetdescapades.com

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  • Aurélie ¦ Bons baisers de Zurich

    C’est une honte, que dis-je, de la pure torture de mettre cet article et de telles photos sous le nez de Françaises expatriées – même en Suisse! Je me damnerais pour une vraie baguette, un bleu ou un camembert bien fait et un bon vin rouge. La Suisse a de nombreux avantages, mais rien à dire, dans cette catégorie la France gagne haut la main!!

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  • J’aime beaucoup les fromages suisses, mais oui, là je crois qu’il faut quand même reconnaître que nous sommes battus à plate couture!

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  • Oui, Laurène, tu as raison, c’est une hérésie!!! Je vais rendre justice au gruyère dans un prochain article :P
    Désolée de te narguer, Aurélie! Je n’avais pas prévu cet effet de torture sur vous, les Français expatriés!!!
    Ah, Julien, eh oui, nous pouvons le reconnaître: ils gagnent, nos chers voisins.

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  • Hello,
    Content de voir que tu apprécies ce met en effet si particulier au coeur des français. Moi qui suis français de la frontière suisse, je connais assez bien (ma grand-mère était d’ailleurs suisse, j’y ai une partie de ma famille) les « contrastes ».
    JE ne polémique pas sur la qualité. Je pense que les deux pays ont de très beaux et bons fromages. Peut-être plus de variété en France? Mais je ne connais certaienement pas tout des fromages suisses. La seule chose qui m’a toujours « choqué » c’est le prix des fromages, et prduits laitiers en Suisse, alors qu’on a l’image du lait comme d’une spécialité nationale! quant au gruyère, de l’emmenthal ou de la tomme, ce n’est pas tant que les produits sont différents. Mais souvent la méconnaissance, voire l’incompétence de certains revendeurs (exemple que tu dois connaître entre le vacherin suisse, et le Mont d’Or français, par exemple). Bienvenue en France en tout cas ;)

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    • Bonjour Jean-Mi. Tu as raison, le prix du fromage en Suisse est très élevé! J’ai été contente de voir qu’ils semblaient un peu plus bas en France. Le Vacherin et le Mont d’Or? Non, je ne connais pas la petite histoire… Est-ce que les noms se confondent? Merci en tout cas pour ton message!

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  • Salut,

    T’as réussi à me donner envie de fromage à 9 heure du mat… Il faut dire que je suis tellement en manque en Autriche que je tuerais pour un des plateaux de tes photos!
    Je laisse volontier le titre de pays du fromage à la France même si j’aime mieux les fromages d’alpages à pâte dure (et la y’a du lourd en Suisse)… Par contre, en venant en Autriche, je m’attendais à trouver du bon fromage… ehhh ben non! pas à Vienne en tous cas…le fromage a du resté bloqué au tyrol…lol! Je suirvis grace aux amis qui nous rendent visite et qui remplissent le frigo à chaque fois…;-)
    Par contre pour le vin rouge (pour Aurélie)… Je trouve qu’en Suisse on se défend pas mal…même si on s’exporte moins bien (on boit tout en Suisse lol)

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    • Hello Benoît! Difficile de ne pas trouver ces plateaux appétissants, hein! Et un bleu pour le petit-déjeuner, un!
      C’est drole, je pensais aussi qu’il y avait de quoi faire côté fromage à Vienne. …heureusement que vous avez des amis charitables. Comme toi, j’adore les pâtes dures de nos Alpages – et j’en mange un max de retour sur le sol suisse.

      Et oui, le vin rouge suisse!!! Les Français n’en reviennent pas quand je leur dis que j’ai grandi dans un pays de vignobles, moi aussi. Ils ouvrent de gros yeux « En Suisse, il y a des vignes qui poussent??? Le vin suisse, ça existe? » Ils croient avoir l’exclusivité de production du pinard ou quoi? …mais bon, c’est vrai qu’on en exporte peu… ;)

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